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27 novembre 2013 3 27 /11 /novembre /2013 18:48

54. Cf. "Satan divisé contre lui-même", in Le Bc. Em., op. cit., chap XIV; d'après un passage de l’Evangi!e selon St Matthieu (Mt 12, 23-28; R. Girard, ibid., p. 272).

Schématiquement l'orgueil et la vanité qui amènent la volonté humaine et infernale d'égaler Dieu, c'est-à-dire de vouloir imposer son individualité aux autres, sa propre autorité, son propre empire, finissent par susciter des oppositions qui se retournent contre vous. D'une certaine manière, le Vieux de Dovre a tenté d'égaler les hommes en se posant en médiateur entre les trolls et les humains, tandis que Peer a tenté d'égaler Dieu en essayant de s'élever au-dessus de sa condition d'homme ordinaire.

5. Dans le processus mimétique, on ne devient pas seulememt le double d'un modèle, de quelqu'un d'autre, mais on en vient, à un certain stade, à se dédoubler soi-même. Comme il l'analyse pour Le Double de Dostoïevski, R.Girard écrit : "L'orgueillleux se croit un dans le rêve solitaire, mais il se divise dans l'échec entre un être méprisable et un observateur méprisant." (Crit. ds., op. cit . , p. 66).

De ce point de vue, l'illusion romantique consiste à ne pas reconnaître la réalité de ce dédoublement : "Le romantique ne se reconnaît pas dans ses propres dédoublements et, ce faisant, les aggrave. Il veut croire qu'il est parfaitement un. Il élit donc une des deux parties de son être - à l'époque romantique proprement dite, c'est en général la moitié idéale et sublime; de nos jours, c'est plutôt la moitié sordide - et il s'efforce de faire passer cette moitié pour la totalité. L'orgueil cherche à prouver qu'il peut rassembler et unifier tout le réel autour de lui." (Ibid., p.68). C'est- ce que R.Girard considère comme "l'impuissance romantique à s'incarner" (ibid., p.82).

Dans le cas d'Ivan Karamazov, " le plus dédoublé peut- être de tous les personnages dostoïevskiens, qui marche lui aussi de façon inégale" (ibid., p. 93), cet observateur méprisant prend les traits du diable : "L'hallucination du diable s'explique, sur le plan phénoménal, par une nouvelle aggravation des troubles psychopathologiques engendrés par l'orgueil et elle incarne, sur le plan religieux, le dépassement métaphysique de la psychologie souterraine. Plus on se rapproche de la folie, plus on se rapproche également de la vérité et, si l'on ne tombe pas dans celle-là, c'est à celle-ci, forcément, que l'on doit aboutir." (Ibid., p. 125).

On retrouve aussi des dédoublements diaboliques à travers bien sûr la nouvelle de Stevenson Docteur Jekyll et Mister Hyde, mais également la figure de Gainsbarre incarnée par Serge Gainsbourg (cf. note 49).

(Philippe Prunet, Sic transit gloria mundi ou la révélation mimétique, 1996/2009)

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