<< Je vous salue sur les bords de la Tamise,
<< Camarades de toutes les nations présents au rendez-vous,
<< Dans la vieille capitale anglaise,
<< Dans le vieux Londres et la vielle Bretagne... >>
Privilège d'une capitale symbole du refus et du courage, c'est vers Londres, haut lieu du rassemblement des adversaires de Hitler, que convergent les espérances des peuples de l'Europe captive - dont Robert Desnos se fait ici le porte-parole. Car Londres, en même temps que le foyer du combat antinazi, apparaît en 1940 comme le théâtre par excellence du destin : "La poussée du temps nous a rejoints", écrit le poète Roy Fuller. "Nous sommes sur la ligne de front", assurent avec raison les cockneys. Et John Lehmann parle au nom de bien des Londoniens lorsqu'il affirme : "De 1940 à 1945, pour rien au monde je n'aurais voulu être ailleurs qu'à Londres assiégé, sinon peut-être à Troie au temps d'Homère." Très vite la capitale souffrant sous les bombes est devenue le centre névralgique de la coalition alliée. Aussi a t-elle pris un air plus cosmopolite que jamais. Refuge des souverains ou des gouvernements en exil de Pologne, de Norvège, des Pays-Bas, de Belgique, de Yougoslavie, de Grèce, base de la France Libre, on y croise tous les uniformes, on y entend toutes les langues. Quand arrivent les Américains, c'est presque une colonisation à l'envers. Dans cette ville affairée, où le jour chacun vaque à ses occupations, la vie nocturne, contrairement à ce qu'on pourrait croire, est intense, en dépit (ou à cause) du danger. Il est vrai qu'une partie importante des habitants, de l'ordre d'un million de personnes, a quitté la capitale pour gagner des lieux moins exposés.
François Bédarida, Londres in. 1938-1948, Les années de tourmente de Munich à Prague. Dictionnaire critique dirigé par Jean-Pierre Azéma et François Bédarida, Paris, Flammarion, 1995.
Robert Desnos (4 juillet 1900 - 8 juin 1945)
(Source image intermédiaire : allmusic.fr)
Blog de Philippe Prunet (Overblog) : 5 mai 2020 et 18 juin 2022.